BUIS (le)



Lacroix : Statistiques du département de la Drôme 1835



BUIS (le)



BUIS (le) (Buxum). - Cette ville, d'une population de 2,180 individus, est à 33 kilomètres sud-est de Nyons, 38 de Carpentras et 118 de Valence. Elle est sous le 44° 16' 50'' de latitude et le 2° 55' 30'' de longitude, dans un vallon resserré, mais agréable, que baigne la rivière d'Ouvèze : la température en est fort douce. Placé au centre d'un assez grand nombre de communes de la partie la plus montagneuse de l'arrondissement de Nyons, le Buis fait avec elles un commerce d'échange que facilitent un marché par semaine, huit foires par an, et une route de communication avec Carpentras ouverte depuis peu d'années. Il y a des fabriques d'ouvraison de la soie et des tanneries. On y commerce en draps du pays, en laine, chapélerie et orfévrerie.
Le vallon de l'Ouvèze, bordé de tous côtés de montagnes élevées, forme la meilleure, mais la plus faible partie du territoire. Ailleurs, le cultivateur lutte sans cesse contre l'aspérité du sol, et tire des produits du flanc même des montagnes. Des murs de souténement, élevés de distance en distance, retiennent la terre toujours prête à s'ébouler.
On ne sait rien de l'époque de la fondation de cette ville ; seulement, diverses inscriptions, trouvées dans les ruines d'anciens tombeaux, semblent faire croire qu'elle commença par être l'asile de quelque peuplade gauloise civilisée par ses relations et son commerce avec Marseille. On fait dériver son nom des buis qui croissent abondamment sur les montagnes voisines, et dont les collines qui l'entourent, où l'on voit maintenant la vigne, l'olivier et le mûrier, ont été long temps couvertes.
Comme toutes les villes de ces contrées que désolèrent les guerres de la féodalité, le Buis prit, au XIIme siècle, un aspect guerrier. Ses fortifications, qui ont existé jusqu'à la fin du XVIIme siècle, consistaient en remparts flanqués de tours, environnés de fossés, et en un château-fort bâti hors de la ville sur le rocher d'Ubrieux. Les remparts existent encore ; les fossés ont été convertis en jardins, et le château n'offre plus que des ruines.
Au démembrement du royaume de Bourgogne, en 1032, le Buis passa sous la domination des barons de Mévouillon, qui en firent leur résidence principale. Cette baronnie étant échue aux dauphins par donation, Humbert II, pendant le séjour qu'il fit au Buis en 1317, à son retour d'Avignon, réunit au domaine delphinal la baronnie de Mévouillon, ainsi que celle de Montauban, qui avait été cédée à Humbert Ier par un traité de 1302. Dèslors, le Buis suivit le sort du reste de la province ; mais lorsque Humbert II remit ses états à la France, en 1349, cette ville ne consentit à reconnaître le roi-dauphin et à lui promettre fidélité, qu'après que les députés qu'elle avait envoyés à Humbert eurent reçu de lui-même l'ordre de se soumettre à son successeur.
Elle prit part aux troubles religieux, et ses habitans eurent singulièrement à souffrir des incursions de Dupuy-Montbrun.
En 1568, elle fut assiégée et prise par Gaspard Pape de Saint-Auban, l'un des chefs du parti protestant.
En 1623, les hostilités recommencèrent dans les Baronnies, et le 1er octobre un fils de Dupuy-Montbrun fit mettre le siége devant le Buis, après s'y être ménagé de nombreuses intelligences. Un de ses lieutenans, nommé Cadart, fut chargé de l'expédition. Il monta le premier à l'assaut. Les assiégés se défendaient vaillamment ; mais sans espoir d'être secourus, et trop faibles pour résister long temps, ils se considéraient déjà comme vaincus, lorsque l'échelon sur lequel Cadart appuyait le pied, prêt à saisir avec la main les créneaux du rempart, fut, dit la tradition populaire, brisé par le jet d'une pierre : le guerrier fut précipité dans les fossés. Sans chef et découragés, ses soldats prirent la fuite, et le laissèrent gisant sur la place, où il fut tué par les assiégés. Comme personne, rapporte aussi la tradition, n'avait vu jeter la pierre, on attribua cette délivrance de la ville à l'intercession de la Vierge, que les assiégés avaient invoquée dans ce pressant danger, et aujourd'hui encore on voit, apposées contre la muraille occidentale de l'ancienne paroisse, deux échelles vermoulues qu'on prétend être celles qui furent employées par Cadart à l'assaut de 1623. On voit également, dans la chapelle du rosaire de l'ancienne église des dominicains, une statue de Notre-Dame-des-Victoires, qui fut, dit-on, érigée en mémoire de cet événement.
La commune du Buis renfermait deux paroisses rurales, l'une à Proyas et l'autre à Saint-Martin, qui ont été détruites pendant les guerres civiles.
La ville est défendue contre les eaux de l'Ouvèze par une digue de la longueur de 900 mètres, construite en 1776 : elle a 5 mètres de base sur 6 de hauteur, dont 2 pour les fondations.
Le Buis est mal bâti, mais il y a de belles promenades et surtout une esplanade, près de la digue, qui offre beaucoup d'agrément ; on y remarque aussi une place publique entourée de halles et plantée d'un double rang d'arbres. A la tête de cette place est une belle fontaine qui ne tarit jamais.
Il y avait avant la révolution un bailliage qui avait pour ressort le pays des Baronnies, une subdélégation, un grenier à sel, un entrepôt général de tabac, un lieutenant de maréchaussée, une juridiction des traites et gabelles, une communauté de chirurgiens, une communauté de religieuses ursulines et un couvent de dominicains fondé, en 1294, par Reymond de Mévouillon, et confirmé par une bulle du pape Clément V du 13 novembre 1309 ; mais en 1793 le Buis perdit tous ses établissemens. Aujourd'hui, c'est le chef-lieu d'un canton ; il y a un bureau de poste, une brigade de gendarmerie à cheval et un bureau d'enregistrement.
C'est la patrie d'Antoine Lemasson, secrétaire de la reine Marguerite de Valois, qui a donné des Commentaires sur le Dante, et en 1558 une traduction du Décaméron de Bocace plusieurs fois réimprimée, et dont la dernière édition, revue et corrigée, est de 1757, in-8°. On a encore de lui les Amours de Phidie et de Gélasine ; Lyon, 1550, in-8° ; une édition des Oeuvres de Jean Lemaire, in-fol., et une des Oeuvres de Clément Marot.

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